W.

When first signifiers become holophrased by Jacques Lacan

I will go so far as to formulate that, when there is no interval between S1 and S2, when the first dyad of signiflers become solidified, holophrased, we have the model for a whole series of cases — even though, in each case, the subject does not occupy the same place. In as much, for example, as the child, the mentally-deficient child, takes the place, on the blackboard, at the bottom right, of this S, with regard to this something to which the mother reduces him, in being no more than the support of her desire in an obscure term, which is introduced into the education of the mentally-deficient child by the psychotic dimension. It is precisely what our colleague Maud Mannoni, in a book that has just come out and which I would recommend you to read, tries to indicate to those who, in one way or another, may be entrusted with the task of releasing its hold. It is certainly something of the same order that is involved in psychosis. This solidity, this mass seizure of the primitive signifying chain, is what forbids the dialectical opening that is manifested in the phenomenon of belief. At the basis of paranoia itself, which nevertheless seems to us to be animated by belief, there reigns the phenomenon of the Unglauben. This is not the not believing in it, but the absence of one of the terms of belief, of the term in which is designated the division of the subject. If, indeed, there is no belief that is full and entire, it is because there is no belief at does not presuppose in its basis that the ultimate dimension that it has to reveal is strictly correlative with the moment when its meaning is about to fade away.

Jaques Lacan, The four fundamental concepts of psychoanalysis, The Seminar Book Xl, Tr. Alan Sheridan, Norton & company, London New York, 1998, P. 237

Suite de sens et des identifications, vues par Lacan

J’irai jusqu’à formuler que, lorsqu’il n’y a pas d’intervalle entre S, et S₂, lorsque le premier couple de signifiants se solidifie, s’holophrase, nous avons le modèle de toute une série de cas – encore que, dans chacun, le sujet n’y occupe pas la même place.
C’est pour autant que, par exemple, l’enfant, l’enfant débile, prend la place, au tableau, en bas et à droite, de ce S, au regard de ce quelque chose à quoi la mère le réduit à n’être plus que le support de son désir dans un terme obscur, que s’introduit dans l’éducation du débile la dimension psychotique. C’est précisément que notre collègue Maud Mannoni, dans un livre qui vient de sortir et dont je vous recommande la lecture, essaie de désigner à ceux qui, d’une façon quelconque, peuvent être commis à en lever l’hypothèque.
C’est assurément quelque chose du même ordre dont il s’agit dans la psychose. Cette solidité, cette prise en masse de la chaîne signifiante primitive, est ce qui interdit l’ouverture dialectique qui se manifeste dans le phénomène de la croyance.
Au fond de la paranoïa elle-même, qui nous paraît pourtant tout animée de croyance règne ce phénomène de l’Unglauben. Ce n’est pas le n’y pas croire, mais l’absence d’un des termes de la croyance, du terme où se désigne la division du sujet. S’il n’est pas de croyance qui ne suppose dans son fond que la dimension dernière qu’elle a à révéler est strictement corrélative du moment où son sens va s’évanouir.

Jacques Lacan, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, le Séminaire livre XI (1963-1964), Editions du Seuil, Paris, 1973, p. 215

T.

This Other would enjoy / come by M. C. Laznik

If the subject put himself in the place of this missing object of the Other, and if this Other existed, then this Other would enjoy/come, says Lacan. This assertion seems far from self-evident, but we can’t leave it aside if we want to tackle jouissance which, according to Lacan, is outside the phallic register, in particular mystical jouissance, where everything seems to revolve around this question. First of all, we need to take the question of lack in the Other not in its most easily representable terms (the castration of the one who occupies this place in the Other, namely the mother) but at a more abstract level. This lack in the Other is what Lacan formulates as: there is no Other of the Other*, that is, there is no ultimate truth of which this Other would be the bearer. This gives us a glimpse of how the making jouir, that is, offering oneself to it in order to fill its lack, could have a direct link with religious discourse, for which the whole question is precisely that there should be a guarantor of this utterance of the Other. But the clinic seems to indicate many other appeals to this Almighty Father. We might wonder whether this obscenity of the over-completeness of the demonic figure might not be there to conceal the unbearable failure of the paternal function. This is the direction the Freudian text seems to point to.

Marie-Christine Laznik-Penot, “La mise en place du concept de Jouissance chez Lacan” in Revue Française de Psychanalyse – Plaisir et Jouissance – t. 54, PUF, 1990, p. 71

Si le sujet se mettait en place de cet objet manquant à l’Autre, et si cet Autre existait, alors cet Autre jouirait, dit Lacan. Cette affirmation semble loin d’être évidente, on ne peut néanmoins pas la laisser de côté si l’on veut aborder les jouissances qui seraient, selon Lacan, hors du registre phallique, en particulier la jouissance mystique où c’est autour de cette question que tout semble pivoter. Il nous faut tout d’abord prendre là la question du manque dans l’Autre non plus dans son repérage le plus aisément représentable (la castration de celle qui occupe cette place de l’Autre, à savoir la mère) mais à un niveau plus abstrait. Ce manque dans l’Autre est ce que Lacan formule comme : il n’y a pas d’Autre de l’Autre*, c’est-à-dire qu’il n’y a aucune vérité dernière dont cet Autre serait le porteur. On peut entrevoir là comment le faire jouir, c’est-à-dire s’offrir à lui pour combler son manque, pourrait avoir un lien direct avec le discours religieux, pour lequel toute la question est justement qu’il y ait un garant de cette parole de l’Autre. Mais la clinique semble indiquer bien d’autres appels à ce Père Toutpuissant. On pourrait se demander si cette obscénité de la surcomplétude de la figure démoniaque ne viendrait pas là comme pour occulter l’insupportable de la défaillance de la fonction paternelle. C’est la direction que semble indiquer le texte freudien.

Marie-Christine Laznik-Penot, “La mise en place du concept de Jouissance chez Lacan” in Revue Française de Psychanalyse – Plaisir et Jouissance – t. 54, PUF, 1990, p. 71

Marie-Christine Laznik-Penot, “La mise en place du concept de Jouissance chez Lacan” in Revue Française de Psychanalyse – Plaisir et Jouissance – t. 54, PUF, 1990, p. 71

* Lacan, “Subversion du sujet et dialectique du désir” in Ecrits, p. 818.

C.

Criminal tendencies are at work in all children by Melanie Klein

Psychoanalysis has shown that the Oedipus complex plays the most decisive role in the general development of the personality, both in people who later become normal and in those affected by neurosis. Psychoanalytic research has consistently shown that the entire formation of character is also linked to Oedipal development, and that all the nuances of character problems, from the slightly neurotic to the criminal, depend on it. The study of criminality is still in its infancy, but the developments it offers are full of promise. The purpose of this article is to show that criminal tendencies are at work in all children and to put forward some hypotheses on the following problem: what are the factors by virtue of which these tendencies do or do not impose themselves on the personality?

I must now return to the point from which I started. When the Oedipus complex makes its appearance, which, according to the results of my analyses, occurs at the end of the first or beginning of the second year, the primitive stages I spoke of – the sadistic-oral stage and the sadistic-anal stage – are fully at work. They are intertwined with the Oedipal tendencies and therefore target the objects around which the Oedipus complex develops, i.e. the parents. The little boy, who hates his father with whom he competes for his mother‘s love, devotes his hatred, aggression and fantasies born of sadistic-oral and sadistic-anal fixations to him. Fantasies in which the child breaks into the bedroom and kills the father are not lacking in any analysis of a little boy, even a normal one.

Melanie Klein, “Criminal tendancies in normal children” in Love, Guilt and Reparation and Other Works 1921-1945, Hogarth Press, London, 1975

La psychanalyse a montré que le complexe d’Œdipe joue le plus décisif des rôles dans le développement général de la personnalité, chez les gens qui plus tard seront normaux comme chez ceux qu’atteindra la névrose. Les recherches psychanalytiques n’ont cessé de démontrer que la formation tout entière du caractère relève elle aussi du développement œdipien, que toutes les nuances des problèmes caractériels, depuis la déformation légèrement névrotique jusqu’à la déformation criminelle, en dépendent. L’étude de la criminalité en est encore à ses premiers pas, mais les développements qu’elle nous laisse espérer sont pleins de promesses. Le propos de cet article est de montrer que des tendances criminelles sont à l’œuvre chez tous les enfants et d’énoncer quelques hypothèses sur le problème suivant : quels sont les facteurs en vertu desquels ces tendances s’imposent ou ne s’imposent pas dans la personnalité.
Il me faut retourner maintenant au point d’où je suis partie. Lorsque le complexe d’Œdipe fait son apparition, ce qui, selon les résultats de mes analyses, survient à la fin de la première ou au début de la seconde année, les stades primitifs dont j’ai parlé – le stade sadique-oral et le stade sadique-anal sont pleinement à l’œuvre. Ils s’intriquent aux tendances oedipiennes et visent donc les objets autour desquels le complexe d’Oedipe se développe, c’est-à-dire les parents. Le petit garçon, qui déteste son père avec lequel il rivalise pour l’amour de sa mère, lui voue la haine, l’agressivité et les fantasmes nés des fixations sadique-orales et sadique- anales. Les fantasmes où l’enfant s’introduit dans la chambre à coucher et tue le père ne font défaut dans aucune analyse de petit garçon, même si celui-ci est normal.

Melanie Klein, “Les tendances criminelles chez les enfants normaux” in Essais de psychanalyse (1921-1945), Trad. Margueritte Derrida, Editions Payot, Paris, 1968 , p. 212

Melanie Klein, Essais de psychanalyse (1921-1945), Trad. Margueritte Derrida, Editions Payot, 1968, Paris, p. 212

E.

Ego ideal at the decline of Oedipus by David Bernard

The Name-of-the-Father is that by which, and thanks to which, the child, at the end of the Oedipus, will separate himself from his imaginary identification to the phallus. The child will be shaken off, says Lacan, “unshackled”, detached from his position of metonymic object of the mother. At the end, the necessity of a symbolic identification will open for the child. No more the identification to an image, but an identification to the insignia of the Other, here the father, which insignia will come to constitute, to the decline of the Oedipus, the ego ideal. Finally, this identification with the insignia of the Other will have another consequence: a modification of the subject’s desire. From then on, the ego is not only an imaginary element in the relation to the mother, but subjectifies itself and becomes itself a signifying element.

Le Nom-du-Père est ce par quoi, et grâce à quoi, l’enfant au sortir de l’Œdipe, se séparera de son identification imaginaire au phallus. L’enfant sera ébranlé, indique Lacan, « débusqué», détachés de sa position d’objet métonymique de la mère. Au terme, s’ouvrira alors pour l’enfant la nécessité d’une identification symbolique. Non plus l’identification à une image, mais une identification aux insignes de l’Autre, ici le père, lesquels insignes viendront constituer, au déclin de l’Œdipe, l’idéal du moi. Enfin, cette identification aux insignes de l’Autre aura une autre conséquence : une modification du désir du sujet. Dès lors, le moi n’est plus seulement un élément imaginaire dans le rapport à la mère, mais se subjective et se fait lui-même élément signifiant.

David BernardLacan et la honte – de la honte à l’ontologie, Editions nouvelles du Champ lacanien, Paris, 2019, p. 25

quoting Jacques Lacan, Le Séminaire – Livre V – Les formations de l’inconscient (1957-1958), Le Seuil, Paris, 1998

S.

Shame and the mother’s eye by Jean Guillaumin

In guilt, “the child” is caught by the father in the act of wanting to fulfill a forbidden sexual desire with the mother and he seeks forgiveness by acknowledging his fault. In shame, the father‘s eye that surprises is a bit that of the mother herself who sees and denounces in the desire that aims at her the anal drive, camouflaged under the effort of idealized phallic seduction.

Dans la culpabilité, « l’enfant » est pris en flagrant délit par le père de vouloir réaliser un désir sexuel interdit avec la mère et il cherche à se faire pardonner en reconnaissant sa faute. Dans la honte, l’œil du père qui surprend est un peu celui de la mère elle-même qui aperçoit et dénonce dans le désir qui la vise la pulsion anale, camouflée sous l’effort de séduction phallique idéalisé.

Jean Guillaumin, « Honte, culpabilité, dépression », in Revue Française de Psychanalyse (1973)t. XXXVII, no 5, p. 1003

M.

Mothers’s eye surprises the shamefull child by Claude Janin

[…] I think I can postulate here that guilt is made possible by the impersonalization of the Superego heir to the Oedipus complex, while the shame is linked to the collapse of the Early Superego and Ego-Ideal which primary object is projectively carryer. As Guillaumin says, it is the father who surprises the “guilty child”, while, for the “shameful child”, “the eye of the father who surprises is the one of the mother herself”

[…] je pense pouvoir ici postuler que la culpabilité est rendue possible par l’impersonnalisation du Sur-moi héritier du complexe d’Œdipe, tandis que la honte est liée au collapsus Sur-moi précoce – Idéal du Moi dont l’objet primaire est projectivement porteur. Comme le dit Guillaumin, c’est le père qui surprend l’ « enfant coupable », tandis que, pour l’ « enfant honteux », « l’œil du père qui surprend est celui de la mère elle-même »

Claude Janin, « Pour une théorie psychanalytique de la honte (honte originaire, honte des origines, origines de la honte) », in Revue française de psychanalyse, 2003/5 (Vol. 67), p. 1657-1742
DOI : 10.3917/rfp.675.1657
URL : https://www.cairn.info/revue-francaise-de-psychanalyse-2003-5-page-1657.htm
Who quotes
Jean Guillaumin, « Honte, culpabilité, dépression », in Revue Française de Psychanalyse (1973), t. XXXVII, no 5, p. 1003